Sacs du Nord
Au Maroc, ces sacs sont appelés les « sacs du Nord ». En effet, dans les deux villes « Ceuta » et « Melilla », enclaves et colonies espagnoles, ces sacs sont chargés de marchandises de contrebande et hissés par des femmes qu’on appelait localement les « femmes mulets » pour rejoindre le Maroc. Ces sacs sont authentiques, c’est à-dire qu’ils viennent du nord du Maroc. Ils constituaient une charge, souvent de 50 à 60 Kg. De vieilles femmes, le dos courbé par ces marchandises espagnoles hors taxes qu’elles livraient aux commerçants marocains des villes avoisinantes.
Dans ce drame, dans cette longue marche, j’ai vu le malheur mais aussi le beau : ces sacs ainsi ligotés représentant l’emprisonnement de ces femmes obligées de se charger comme des mulets pour subvenir aux besoins de leurs familles.
La corde protège les sacs mais les attachent aussi aux dos de ces femmes qui les attachent aussi à une vie de servitude. Et quotidiennement, ces sacs voyagent à dos de femmes qui traversent les postes frontières sur des kilomètres à pied dans la souffrance.
Pour moi cette souffrance donne lieu aussi à la dénonciation par l’art.
Ce travail fait appel à notre sens de compassion, toute la vie des femmes-mulets est emprisonnée dans des sacs de contrebande. En traversant les frontières entre l’enclave espagnole de Ceuta et le Maroc, Ces femmes souvent des vieilles ménagères, transportent des charges de plus de 50kg enfouies dans des sacs dits « du Nord ».
La sculpture se veut un appel artistique à la dénonciation de ces usages inhumains. Les cordes servant au transport sur le dos semblent ligoter le corps de la femme à sa marchandise, à son destin.
Enchaîner l’homme à son moyen de subsistance c’est l’avilir tel un animal de trait attaché à sa charrette ou à sa meule de pierre.
Le spectateur est forcé à un ensemble de questions dont l’aboutissement est de créer une prise de conscience de la pauvreté qui jouxte l’aisance.
Je ne me permets pas un engagement pour quelques causes que ce soit vu ma nature rebelle, mais tant que cela touche à la liberté de l’homme, j’adhère instantanément.
Quelques sacs et des cordent poussent le spectateur à une réflexion profonde sur notre relation au travail qui devient une malédiction.